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Toujours soucieux d’élaborer un dialogue entre des personnes qui, si elles ne partagent pas la même foi, évoluent malgré tout dans une culture religieuse commune, je me vois contraint de repousser à nouveau la question du bouddhisme. Je ne désespère pas et je sais bien qu’il nous faudra de toute façon à un moment ou à un autre sortir un peu de nos horizons abrahamiques, ne serait-ce que pour les élargir et, peut-être même, mieux les comprendre, en mieux comprendre certains fondements.

En attendant, je vous propose aujourd’hui de revenir sur différents points de nos discussions antérieures et, en particulier, sur l’articulation entre foi et raison au regard de ce que j’ai postuler la dernière fois et qui se résumerait plus ou moins de la manière suivante : en produisant l’idée d’un savoir absolu résidant en un Dieu unique, omnipotent, tout puissant, omniprésent et omniscient, les religions abrahamiques, au moins celles qui sont représentées parmi nous, à savoir le christianisme sous les aspects du catholicisme et le judaïsme, ont ouvert la possibilité d’existence de la rationalité occidentale, dans son élan vers la découverte de l’absolu, mais aussi dans son exercice du doute, comme nous le faisait remarquer très judicieusement notre ami Jean-Albert. 

Faut-il en déduire que la rationalité grecque, le logos, serait différente en quelque sorte de la rationalité judéo-chrétienne ? À vrai dire, et quels que soient les passages de l’une à l’autre, si les grecs se sont arrêtés avant de rendre possible le déploiement de la techno-science c’est aussi parce que leur conception de la nature ne pouvait déboucher sur l’idée de progrès. Il me semble que c’est un point majeur, autrefois soulevé par le philosophe grec Kostas Papaïoannou. En se pensant comme faisant partie de la nature, les grecs anciens n’auraient pas éprouvé de besoin de maîtrise de la nature et de développement illimité de la technique. Il en serait tout autrement pour ceux qui suivent l’Ancien testament, dans lequel la nature est donnée aux hommes pour qu’ils puissent l’assujettir.

L’illimitation de la techno-science mue par l’idée d’un possible progrès infini ne repose-t-elle pas sur l’idée d’une raison se fondant elle-même sur la supposée accessibilité d’un savoir absolu, que ce soit en suivant le chemin de la foi ou en sortant de ce chemin ? Comment, alors, le christianisme catholique et le judaïsme, s’accommodent-ils des impératifs d’accumulation infinie du capitalisme marchand ? Le christianisme et le judaïsme, ainsi que leur pendant, leur héritage, athée, sont-ils par nature voués à soutenir et à célébrer l’illimitation de l’expansion marchande, qui envahit aujourd’hui chaque recoin de nos vies ?